Ce que j’aime, c’est quand j’entends la voix des personnages.
Leurs voix. Multiples. Plurielles.
Elles tracent des sillons, parallèles, qui se mêlent, se démêlent sur le fil de l’histoire.
Quand ils me parlent, quand je suis assis à côté d’eux, qu’ils me racontent le décor, qu’ils bougent dans cet espace, qu’ils sourient quand ils perçoivent un détail amusant décrit ici ou là et, même s’ils ne me voient pas, je décèle leur regard, l’intention derrière le regard, l’objectif derrière l’intention.
J’aime quand les personnages se retrouvent ensemble dans une pièce, dans une scène, en pleine action, en pleine intimité, qu’ils se parlent et échangent en roue libre… Je me cale dans un coin, présent, en spectateur attentif qui prend des notes comme le ferait un observateur, un scribe ou peut-être un rapporteur.
J’aime me projeter au coeur de l’action, je perçois alors les choses en même temps que les personnages ; ils me les font ressentir en me prenant par le mot. Je peux laisser la scène se dérouler, la laisser m’entraîner, je peux la mettre sur pause, revenir en arrière, jusqu’au point de décision, imaginer ce qu’untel exprimerait à ce moment-là. Je rejoue la scène, les scènes, encore et encore, jusqu’à ce qu’elles s’ancrent et s’imbriquent dans le continuum du scénario ou bien jusqu’à ce que je réalise que l’une d’elles ne fera pas l’affaire ou bien qu’elle ouvre sur d’autres possibilités, plus extraordinaires encore.
Cette musicalité pulse, elle arrive, elle repart, tantôt faible ou puissante, sporadique ou constante. Puis, elle se fait mélodie, un air que l’on se chante, que l’on se met à aimer, cet air qui apporte le petit frisson…
Quand elle se répète, que ses différentes partitions, complètes ou incomplètes, commencent à trouver leur place, alors c’est que l’histoire est prête à être couchée sur le papier.
Et vous, entendez-vous votre musique, l’entendez vous craquer, grésiller ?